Et si la liberté consistait à simplement posséder le temps…
Cette idée de liberté m’a toujours fasciné ; J’entends ce terme là en aucun cas comme le fait de pouvoir être indépendant dans un appartement, travailler, pouvoir subvenir à tous ces besoins grâce à son travail… Non, la liberté s’en trouve à des kilomètres de cette définition ; Elle est instable, dure, réel, profonde, bordé d’imprévus et de surprises, elle est plus puissante que n’importe quelle drogue, plus enivrante qu’une folle nuit d’amour déchainé et plus belle que la plus belle des femmes de ce monde. Elle offre à celui qui l’approche une vérité sans équivoque, une vérité sur l’amour de toutes choses, sur la complexité et la simplicité des besoins humain, elle détruit sans scrupule les murs et barreaux que nos êtres s’étaient créer jusque-là et laisse enfin entrer les sensations instinctives trop longtemps contenu en nous ; Ces sensations se libèrent de cet emprisonnement et envahissent jusqu’à la plus petite parcelle de notre corps. Peu à peu, tel un myope revêtant une paire de lunette correctrice, le monde se fait moins flou et s’ouvre à nous de façon simple et brutal ; Au début on peut avoir tendance à le rejeter, à le craindre du fait de cette absence continuel de repères et de sécurité, mais alors que l’on croit l’avoir apprivoiser on se rend compte que c’est en fait lui qui nous accepte dans sa réalité. Ce monde devient alors votre ami et vous lui faite confiance en vous abandonnant à lui. Dès lors vous vous sentez libre, libre d’aller où vous voulez, libre de ne rien faire, libre de penser, libre de tout… Vous ne vous projeter plus constamment dans l’avenir, vous ne vous souciez plus de vos biens, vous laisser tomber la cape du superflu que la société vous force à revêtir, vous êtes libéré…
Bref après les réflexions, l’action !
Je venais de quitter le camping auquel j’avais travaillé une dizaine de jours et reprenais la marche tranquillement.
Je quitta l’île de Manamansalo par un petit ferry gratuit puis après avoir repris la terre ferme j’évitais les grosses routes emmerdandes par de paisibles pistes de sables au milieu de belles campagnes Finlandaises. Les villages étaient plutôt espacés et je ne fis que de très brèves rencontres ; Mais l’arrivée du printemps avait suscité en moi un besoin de me retrouver, de camper au bord des lacs en lisant, de siroter tranquillement le doux jus de cette vie libre qui s’offrait sans limite de temps… Mon corps avait subi sa période de rodage et mon esprit avait finis par abandonner sa rébellion contre la solitude. J’étais bien, heureux et ne souhaitait rien de plus que ce que mes épaules portaient, mes yeux voyaient et les lieux où mes pieds me guidaient.
De partout la vie surgissait en bonds de lièvres gambadant joyeusement dans les champs labourées, en oies revenant de leur longues migration, en hérons péchant dans les rivières omniprésentes ou encore en rennes (assez rare) broutant le lichen au milieu des forêts.
Bon parmi ces beaux animaux il y en un qui m’a fait plutôt flipper : Les vipères, dont je trouvais les cadavres écrasés par les voitures tous les kilomètres environ. Je hais tous simplement les serpents et la simple idée que une de ces vipères puissent se glisser dans ma tente me fais frissonner d’effroi ! Heureusement rien de fâcheux m’est arrivé !
Quelques jours passèrent puis me vint l’idée de faire un peu de WWOOFing en Finlande ; Gnnnneuuu c’est quoi le WWOOFing ? Le World-Wide Opportunities On Organic Farms pour les intimes, est un réseau mondial de fermes bio et de communautés se proposant d’accueillir toute personne souhaitant partager leur quotidien et leur travail en l’échange du gite et du couvert.
Et rappelé vous l’année dernière en Ecosse, où avec François nous avions travaillé un mois en tant que Wwoofer dans une communauté de personnes. Cette expérience m’avait tellement plut que l’envie d’en refaire tout au long du voyage me prenait.
Chaque pays a son propre réseau sous forme d’un site internet et propose un large panel de choix au niveau des fermes accueillantes. Malheureusement l’inscription pour une année est d’environ 2O euros mais le hic c’est que cette inscription est valable que pour un pays ! En clair si vous voulez faire du wwoofing sur plusieurs pays il vous faudra payer 20 euros à chaque fois ! Mais après quelques recherche j’ai trouvé sur la toile un site de wwoofing indépendant ou l’inscription de un an (20 euros) donne accès à pratiquement tous les pays du globe ; Bien sur le choix est plus restreint mais il reste très suffisant. Pour les intéressés l’adresse est la suivante : http://www.wwoofindependents.org
Du coup quelques jours de marche plus tard m’amenèrent au village de Kjuruvesi, où après m’être acheté quelques petites douceurs culinaires, je me rendis à la bibliothèque. Les priorités en premier, c’est-à-dire les dernier épisodes de Game of Throne, puis je fis mon inscription sur le site internet. J’étais assez attiré par la région de Kuopio et trouva deux proposition de Wwoofing aux abords de la ville. Une retins particulièrement mon attention et je leur écrivis un Email pour me présenter et proposer ma venue. La bibliothèque fermant ces portes, je dus repousser à demain l’attente de leur réponse. C’est donc au milieu de ce grand village que je planta ma tente dans une petite « forêt »; La Finlande a ce chic de laisser la nature au cœur même de ces villes et villages… Au menu ce soir : Velouté de pates aux boulettes de viande marinées suivis de fabuleux récits de guides de haute montagnes des années 1940 ; Frison Roche à cette façon particulière de réussir à transporter le lecteur sur les hautes cimes enneigés des alpes ; Tout cela en nous faisant prendre d’affection les personnages grâce à ce fabuleux coup de plume décrivant avec brio les pensées et personnalités de ces guides dont leur simplicité et amour de la montagne nous offre un attachement tout particulier pour chacun d’entre eux. Pour dire j’ai eu l’impression de perdre un être chère lorsque Zian rendis son dernier souffle après un combat acharné de une semaine à essayer de sortir d’une crevasse.
Je retournais le lendemain à la bibliothèque et obtins la réponse du Wwoofing : ils étaient d’accord pour me recevoir !!
La ville de Kuopio était situé à cinq jours de marche et je partis en milieu de journée.
La pluie m’a bien fait chier les deux premiers jours et à chaque fois j’ai eu à plier la tente sous les averses ; Mine de rien une tente mouillée dans le sac pèse bien 25% de plus !! Heureusement la troisième nuit je réussi à trouver un magnifique abri dans une petite remise à bois sous forme de tente. J’ai même put faire cuire ma tambouille grâce à tous ce bois sec !
Et le beau temps arriva et j’arriva à Kuopio deux jours après. D’après Google map la ferme qui allait m’accueillir semblait être construite au beau milieu d’une grande forêt situé à un kilomètre du centre-ville, et pour m’y rendre j’avoue avoir eu un peu de chance : Il y avait des immeubles un peu partout et voilà que j’arrivais devant une grosse colline remplis de beaux pins ; un petit sentier était indiqué et ce dernier partait en direction du centre de la forêt. Je le prit et deux kilomètres plus loin, un peu perdu dans les bois, je tomba sur un plus gros sentier, et alors comme dans un rêve j’entrais d’un seul coup dans une immense clairière où était disposé en son centre une petite ferme ; De grand potagers et champs l’entourait et je ne sais pas si l’effet produit était le rajout à cela d’un cheval broutant l’herbe au fond, ou encore les petites poules trottant joyeusement sur le chemin ou même encore le champ du coq s’élevant brusquement d’un baraquement, mais j’ai eu l’impression de pénétrer dans une sorte de village caché, un village de schtroumfs secrètement dissimulé dans la forêt… Cette sensation de basculer dans un autre monde me prit le cœur d’un seul coup et je me voit encore avancer doucement en me demandant si je ne m’était tout simplement pas assoupi contre le tronc d’un bouleau… Une femme était dehors et vint à moi en me demandant si j’étais le nouveau volontaire. Elle me conduisit à l’intérieur et je fis alors la connaissance de tout le monde. Il y avait tout d’abord les propriétaires, Keijo un homme à la barbe hirsute et au yeux pétillant d’émotion, ainsi que sa mère Maia, une toute petite femme semblant débordé d’une secrète énergie en permanence ; Vint ensuite Selma, la responsable en quelques sorte des potagers et woofers dont la passion de la terre se lisait dans ces paroles lorsqu’elle en parlait ; Et enfin Lara, une jeune allemande qui faisait ces études en Finlande et qui avait décidé de faire sa première expérience de Woofing.
Après des présentations et de la bonne parlote, Keijo me fit visiter les alentours tout en m’expliquant ce qu’il fallait savoir :
La ferme du nom de Konttila, était la plus ancienne de la ville de Kuopio et avait été rénové tout au fil de ces années. Keijo et sa mère n’en était pas exactement les propriétaires et ceux-ci louait cette propriété appartenant à la ville de Kuopio. Keijo, ayant vécu son enfance à proximité, il avait saisi l’opportunité de reprendre cette ferme lorsque l’occasion de la louer lui avait été donnée. Dès lors il semblait avoir transformé cet endroit en point de restauration où les visiteurs et touristes avait la possibilité de venir prendre un lunch , faire un tour de carriole en cheval, observer les divers animaux de la ferme ainsi que découvrir les jardins potagers.
Keijo me confia qu’il se battait depuis plusieurs années avec des entrepreneurs qui lui faisait pression afin d’abandonner cet endroit magique pour en faire un stupide terrain de golf… La forêt tout autour était une sorte de parc naturel protégé où d’innombrables sentiers la jalonnait. Cette histoire me faisait alors m’imaginer Konttila comme un village résistant encore et toujours à l’envahisseurs.
Il y avait pas mal d’animaux, notamment trois beaux chiens débordant de vie (et de bave), un cheval du nom de Miloo, quatre poules et trois coqs , des abeilles pour le miel ainsi que cinq moutons et un vieux bouc.
Au niveau des constructions il y avait la grande étable servant de remises et d’abri pour les bêtes, une sorte de petit musée rustique puis la maison où les clients s’installaient à l’intérieur. L’agencement de cette maison était simple, elle se constituait à simplement une grande salle magnifiquement décoré de vieux outils et réalisations artistiques, d’une cuisine où Maija en était la reine des fourneaux, ainsi que un grenier tout plein de charme où les wwoofers dormaient. Il n’y avait pas de douche et on puisait l’eau potable dans une source à 3OO mètres. Le rêve quoi !!
Le travail des volontaires consistaient à nourrir les bêtes, s’en occuper, tenir la réception des clients, faire la cuisine, ainsi que travailler dans le jardin. Il n’y avait pas d’horaires, chacun travaillait quand il le voulait, mangeait quand il le souhaitait et prenait ces pauses quand il le désirait.
Durant les premiers jours je passa beaucoup de temps avec Lara qui me faisait découvrir les environs ; L’attraction touristique la plus proche était la Puijo Tower, une grande tour de 75 mètres surplombant tous les alentours. Kuopio étant situé à la limite de la région des milles lacs, il était impressionnant de voir ces centaines de petites îles uniques dispersées de partout.
Tandis que Selma nous montrait les rudiments du potager, Keilo nous expliquait comment prendre soin de ses animaux. Il vint même à nous confier son « secret weapon » afin de rassembler les moutons dans leur étable : Le bruit de bouts de pains séchés rebondissant dans un seau ! Et il fallait les voir se précipiter en se bousculant !
Le jardin, ou plutôt les jardins, étaient des champs que Keijo venaient de labourer avec son tracteur, du coup avant de pouvoir planter la moindre graine, il a fallu retourner la terre à la bêche afin d’en extraire les herbes et pierres ; Travail harassant mais nous y allions tranquillement et au bout de quelques jours les premiers oignons, patates et tomates étaient plantés ! Nous travaillions pieds nue et sans gants et je dois dire que cette expérience de sentir la terre à même son corps était fascinante… De marcheur, j’étais devenu paysan, prenant plaisir à travailler la terre, observant et prenant soin de chaque vers de terre en leur soufflant bonne continuation et en me douchant au tuyau d’arrosage tous les soirs.
Comme Keijo et Mia ne logeaient pas à Kontilla, je restais chaque nuit à la ferme avec Lara où nous discutions agréablement sur nos vies respectives. Son anglais était vraiment parfait et elle me fit beaucoup progresser !
Durant trois jours Selma avait organiser une « working session », c’est-à-dire une invitation à tout pleins de gens de venir aider aux potagers. Ce fut vraiment sympas, en plus de rencontrer de nouvelles personnes nous faisions de gros repas tous ensemble, passions les soirées au coin du feu en faisant griller des bonnes saucisses tout en buvant des bières locales puis en allant se baigner dans le lac pour se revigorer !
Une journaliste est même venus nous interviewer et l’on fus parus dans le journal quelque jours plus tard.
Heureusement, presque tout le monde parlait anglais et bien que l’on essaya de m’initier au Finnois mon cerveau de semblait pas accepter ce nouveau langage dont la prononciation des phrases et mots était un véritable défi pour moi. La morphologie de cette langue est vraiment complétement différente de l’Anglais ou du Français ; Elle est basé sur le principe d’agglutination c’est-à-dire que les mots se modifies en fonction du sens de la phrase ; Par exemple le terme « joki » signifiant « le fleuve », devient « joessa » pour dire « dans le fleuve » ; Il n’y a ni articles ni genres et les mots sont d’ailleurs souvent très longs. C’est bien simple un seul mot peut parfois donner une foule de renseignements !
En Finlande, plus particulièrement dans la partie sud du pays où les lacs sont abondants, certains de ces derniers sont si étendus qu’il est possible de se rendre à d’une ville à l’autre espacé de plusieurs centaines de kilomètres rien qu’en empruntant les voies maritimes. Les bateaux, les barques, les voiliers, tous ces moyens de transports sont aussi nécessaire que la voiture et Keijo nous emmena un soir pour une course de voilier en compagnie de deux de ces amis. Leur bateau de 9 mètres était bien cool et l’on pris place à cinq dedans ; Le départ lancé, il fut impressionnant de les voir manier les voiles et le gouvernail avec autant de dextérité. Ils nous expliquèrent les rudiments du « sailing », notamment les façons d’avancer par rapport au vent, le bon moment où il faut changer les voiles, les réflexes à toujours avoir, bref une formidable expérience !
A la fin de la première semaine, Lara nous dit au revoir car bien que ces cours Erasmus étaient finis, elle voulait rester encore un peu en Scandinavie afin de découvrir la Norvège et la Suède.
Je restais donc le seul volontaire de Konttila ; Les jours suivant se passèrent pour moi d’une façon calme et paisible ; Je ne regardais plus l’heure, travaillais la terre, m’occupait des bêtes le matin et le soir ; Je passais beaucoup de temps avec Keijo avec qui j’avais de belles discussions. En le voyant prendre soin de ces animaux avec autant d’amour dans le regard, on voyait que c’était le genre d’homme qui tenait à égale les hommes et les bêtes, il appréciait la solitude et la proximité de la nature autour des choses simples, et cette vie dans cette ferme au milieu de la forêt semblait avoir été créé spécialement pour lui…
Assez tenté de leur faire connaître la bonne cuisine Française, je me prit une petite passion pour cette dernière : Marmiton étant mon ami je fis pleuvoir des pizzas, des quatre quart, des tartes aux oignons, rhubarbe, fraises, bref je pense leur avoir montré que la France aime la bonne boustifaille !
Quelques jours plus tard Keijo et Selma m’emmenèrent dans une réserve naturelle où leurs club de canoé était installé. Quelques kilomètres à marcher dans une belle forêt et nous débouchons soudainement au abord d’un lac dont la superficie s’étalait sur des dizaines de kilomètres. L’on pris place dans les kayaks et ce fut partis pour plusieurs heures de balades au milieu de fantastiques paysages, nous faisans parfois emprunter des passages dignes de jungles tropicales ! Nous nous arrêtons à mi-parcours sur une ile afin d’y faire griller quelques saucisses et de boire le thé ; Après l’effort le réconfort et de retour au baraquement, malgré qu’il était minuit nous prenons place au beau sauna, en alternant nage dans le lac et douce suffocation.
Mon prochain pays est la Russie, et bien sûr on n’y entre pas comme dans un moulin ! Je passa donc une journée à faire ma demande de Visa et à l’envoyer ; Cela me faisait bizarre de me dire que la Scandinavie touchait bientôt à sa fin….
Les deux derniers jours à Konttila passèrent vite : Un beau concert de musique traditionnelle joua un soir à la ferme puis je me rendis le lendemain en ville afin de rencontrer deux jeunes ayant fait plusieurs semaines de marche à travers la Finlande ; Leur contact m’avait été donné par un chère ami vivant actuellement en Finlande (Je vous donne RDV pour le prochain et dernier récit de Finlande pour ceci^^). Mikko et Erika était deux beaux amoureux étant professeur de cirque ; Ils partaient une à deux fois par an à travers la Finlande afin d’y marcher une à deux semaines. Leur particularité étaient qu’ils voyageaient avec pratiquement rien sur le dos et se débrouillaient chaque nuit pour trouver un endroit où dormir. Ils me firent visiter la ville et m’emmenèrent voir une représentation de danse contemporaine où un de leur amis y participait.
Et la dernière journée arriva sans que l’on puisse l’éviter… Je passa la soirée chez Keijo, où dans un bon sauna et devant une tasse de thé, nous savourions ce moment en discutant de tout.
Le lendemain matin près avoir rangé mon petit grenier, je fis mes adieux à tout le monde, toujours en versant l’inévitable petite goutte salé…
En quittant cette prairie magique, je ne pus m’empêcher de ressentir un impressionnant élan de liberté, les portes du monde s’ouvraient à moi de plus en plus et les innombrables chemins qui s’en découlaient devenaient peu à peu le sens même de ma vie….
Jérôme