Partie 9 – Cap Nord, nous voilà !

Suede

Nous partons de Kautokeino assez tard car Sondre avait un colis à envoyer et des lettres à poster.

Juste avant de quitter le campement il abandonne son beau bâton qu’il portait depuis déjà presque 800 kilomètres.

Marcher avec un bâton est vraiment une belle expérience ; Pour en avoir un depuis le début de l’aventure je dois avouer que c’est devenu un peu comme une troisième jambe ou un troisième bras ! Ce simple morceau de châtaigner de 1 m 70 ferré d’un bout, remplit toutes sortes de fonctions : Il m’aide à traverser les rivières, il me fait tenir le coup lorsque je peine à avancer, il dégage les chemins trop broussailleux, il me sert à sonder les marécages trop profonds, il me permet d’atteindre des endroits inaccessibles et surtout il me fait sentir en sécurité.

Une fois retourné sur la route goudronnée la pluie se joignit à nous et quelques heures plus tard nous marchions tout trempé ! Nous quittons l’axe principale afin de prendre une route de graviers allant dans la même direction. Une fois celle-ci dépassé nous décidons de planter les tentes.

Toute la nuit il a plu des cordes et heureusement le beau temps arriva en milieu de journée. Le chemin de graviers se révéla très agréable et la soirée arriva tranquillement.

Nous faisons la découverte près d’une rivière de plusieurs petites pierrites et d’après Sondre les cours d’eau du Finnmark contiennent beaucoup d’or !

Le lendemain rebelote, belle journée ponctué de quelques averses pas bien méchantes ; Afin d’avoir une plus grande liberté pour chacun de nous, nous convenons désormais à chaque début de journée un lieu de bivouaque sur la carte puis partons chacun à notre vitesse. Libre à nous alors de s’organiser comme on le voulait dans la journée. C’était marrant de se sentir seul durant ces quelques heures… Et le soir c’était bien cool de tous se revoir. Un peu comme si chacun de nous partais travailler la journée !

La nuit progresse encore et vers 22 h 30 maintenant c’est pratiquement la nuit noire jusqu’à 4 heures du matin.

Deux jours plus tard nous arrivons dans la ville d’Alta. Celle-ci s’étalait sur plusieurs kilomètres et semblait vraiment très importante (Bon 20 000 habitants en France ça peut paraitre ridicule mais en Scandinavie c’est considéré comme une grosse ville !).

Nous flânons quelques temps en ville, à faire des petites courses de matériel et de nourriture. Chaque bibliothèque de Scandinavie possédant une salle équipé d’ordinateurs, nous y restons un peu pour obtenir quelques informations sur les prochains jours. En me rendant dans les toilettes publiques j’hallucine complétement quand à mon reflet ! Cheveux en pagaille, barbe qui pousse et tee short crasseux ; Attention clochardisation en cours ^^

Nous quittons la ville en début de soirée sous un soleil couchant magnifique sur l’océan qui venait de nous apparaître. Cela faisait des mois que l’on ne l’avais pas vu ce bel ami !

Le lendemain les premiers panneaux kilométriques indiquant le cap nord apparurent ; Environ 240 kilomètres, c’est-à-dire 7-8 jours de marche.

Nous rentrons dans les terres afin de rejoindre le côté ouest puis marchons au milieu de plateaux gigantesques que la E6 traversait. Le mauvais temps se pointa et nous campons près de la route.

C’est fou comme le matériel s’use vite ; Mon duvet, pas lavé depuis des mois, fait des sortes de grosses boules de plumes et n’est vraiment plus aussi performant qu’avant ; Mon sac à dos devient de moins en moins confortable et je suis obligé de faire des nœuds pour chaque sangle afin d’éviter qu’elles ne se desserrent ; La tente, bien que encore en bonne état, m’est devenu insupportable à cause de son espace plutôt restreint ; Les semelles des chaussures diminue sans grand étonnement puis la veste gore tex n’est plus aussi imperméable qu’à son début !

Mais bon j’ai beau pester contre tout cela il ne reste pas que je suis quand même très attaché à tout ce que je porte. C’est dingue comme le simple fait de ne pas posséder grand-chose nous apporte une grande importance à chaque élément. On prend du plaisir à les entretenir et à les réparer jusqu’au bout…

Nous arrivons à Olderfjord deux jours plus tard. Ce petit village est construit juste avant la longue route menant au Cap Nord. Pour expliquer plus clairement, il y a seulement une seule route menant au Cap Nord et nous serions obligé de faire l’aller-retour… De ce fait nous cachons dans un bosquet quelques affaires dont nous en aurions pas l’utilisation ces prochains jours.

Après cela nous partons pour les 130 derniers kilomètres. La route, bien que très emprunté par de nombreux cars de touristes et voitures, était vraiment magnifique ; De magnifiques criques et fjords, des maisons scandinaves traditionnelles et des paysages de rêves…

Nous avions décidé de marcher seul aujourd’hui et de se retrouver le soir.

Un tunnel de trois kilomètres se trouvait 20 kilomètres plus loin et lampe frontale sur la tête je le traverse en chantant à fond des bonnes chansons paillarde bien de chez moi !

Alors que la fin de journée arrivait et que le jour déclinait j’aperçut à moins de 200 mètres en plein océan, un aileron ! Orques, dauphins ? Apparemment c’était plus un orques. Celui-ci me tennis compagnie en me suivant jusqu’au soir !

Il faut savoir qu’à cette latitude, beaucoup de choses changent, notamment l’absence totale de végétation ! Les reliefs des montagnes semblaient irréelles voir même lunaires… De nombreuses espèces d’oiseaux uniques au monde vivent dans ces terres reculées, mais bon nous n’étions pas forcément des connaisseurs pour pouvoir les observer. Les rennes sont absolument de partout, y compris sur la route en troupeau !

Je trouve un lieu de camp vraiment sympas au fond d’une belle crique et les autres arrivèrent une heure plus tard.

Nous mangeons quelques crêpes tous ensemble et je finis la soirée à parler avec François et à observer le feu crépiter dans l’obscurité.

Le lendemain matin nous nous fixons un objectif : Atteindre l’entrée du grand tunnel de 7 kilomètres ; En, effet le Cap Nord étant situé sur une île, ce tunnel passait par-dessous l’océan !

Nous partons donc chacun de notre côté le lendemain matin pour cette grosse journée de plus de 50 kilomètres.

La pluie arriva et en milieu de journée je retrouvas François et nous décidons de marcher ensemble. Le vent et la pluie glaciale doublait d’intensité à chaque heures et la fatigue commençait à vraiment se faire sentir. Vers 23h, glacé, trempé, affamé et mort de fatigue, le tunnel apparut et nous l’atteignons après exactement 52 kilomètres depuis ce matin !

A notre grande surprise, nous distinguons un peu plus loin la tente de Sondre ! Celui étant partis plusieurs heures après nous je ne comprenais absolument pas par quel moyen il avait pu arriver avant nous. Il sortit de sa tente le sourire aux lèvres et se mit à vraiment rigoler de nous voir que maintenant ! Apparemment il avait coupé à travers la montagne en suivant sa carte ce qui lui avait permis de gagner bien 15 kilomètres !! Sous ce déluge, tout seul, je dois dire que sur ce coup il m’a vraiment impressionné !!! Nous rigolons tous ensemble de cette journée éreintante et Sondre finis par nous inviter dans sa tente pour manger des bons spaghettis !!! Cette soirée fut vraiment exceptionnelle, à manger tous comme des ogres et à rigoler de n’importe quoi.

La nuit ne fut pas très réparatrice et nous attaquons le tunnel dès le petit matin. Comme ce dernier passait par-dessous l’océan il descendait d’un coup puis remontait ensuite. Ce fut un moment assez dure pour moi car l’air, malgré le fait qu’un système de ventilation était mis en place, était très lourd et chargé de rejet de pots d’échappement. Deux heures plus tard, enfin, le bout du tunnel arriva et c’est à grandes lampées d’oxygène que je fis les premiers pas !

Nous étions donc sur l’île du Cap Nord !!

Les paysages étaient troublant de beauté, les terres sans le moindre arbre semblaient être des icebergs s’enfonçant progressivement dans la mer ; Et puis… les oiseaux, les rennes, les fjords, comment ne pas voir une grâce naturel là-dedans !

Nous atteignons quelques heures plus tard le village de Honningsvag où nous allons directement au supermarché ! Pour nos dernières courses ensemble nous nous faisons bien plaisir individuellement puis faisons un bon gouter dehors. Nous rencontrons même un Français de 28 ans qui parcourait la Norvège en stop depuis un mois.

Nous marchons encore 10 kilomètres puis s’installons pour la nuit. La fatigue devenais vraiment intense et je pense que je prendrais quelques jours de repos bien mérité une fois arrivé au Cap Nord.

Durant la soirée nous apprenons une nouvelle phrase en Français à Sondre « Je vais te niquer » ; Ça va quand même vraiment me manquer tous ces bons moments….

Episode plutôt marrant en ce début de matinée : J’étais tranquillement en train de couler un bronze sur les hauteurs lorsque un hélicoptère venu de je ne sais où vint se planter en stationnement à 50 mètres au-dessus de moi ! Et le pire c’est qu’une énorme caméra fixé à l’engin semblait être braqué sur moi ! Je ne vous dit pas le grand moment de solitude….

Il restait 28 kilomètres et nous décidons de les faire aujourd’hui !

La route partait en lacets puis s’étalait sur plusieurs kilomètres au milieu d’un plateau désert. A ce moment-là un vent vraiment violent ainsi que une pluie battante vint sur nous. Le froid nous prit de court et il nous fallut renoncer à continuer sous ce déluge. Selon Sondre la tempête serais bien plus forte au Cap Nord et bien qu’il ne nous restait que 13 kilomètres nous décidons den planter les tentes. Quelle bonheur ce fut de pouvoir se réfugier dans son petit cocon de chaleur alors que dehors tout n’était que vent, pluie et froid. Nous passons notre dernière soirée à trois dans la tente de Sondre… Celui-ci s’était préparé le même repas qu’il s’était fait lors de son premier jour de voyage, il y a de cela 7 mois : Des bons tacos mexicain !

Le lendemain il nous a fallu attendre 10 h du matin avant que le mauvais temps se calme. Nous partons pour nos «Derniers kilomètres »… Sondre voulu partir en avant afin d’arriver seul là-bas.

Le paysage était d’un plat inouïe et d’une beauté incroyable… Enfin au loin nous apercevons une infrastructure ! Là-bas se terminait une aventure pour en laisser place à deux nouvelles, là-bas se trouvait le bout de notre « fil d’Ariane », là-bas se séparerons trois amis…

Des images de toutes les choses qui nous était arrivé se bousculait dans ma tête : Notre départ l’année dernière, notre arrivée en Irlande, le Connemara, le séjour chez Padraig, la venue de notre ami Thomas en Ecosse, la rencontre des communautés New Bold et Woodhead, le bateau stop pour aller en Norvège, nos premiers pas et rencontres en Scandinavie, notre mésaventure sur ce plateau Norvégien, l’accueil incroyable de Rolf et sa famille, les mois passés dans la montagne où nous y avons rencontré Robert, Thomas et Sondre… Mais il y a aussi des choses plus bégnine et sans doute aussi importante telle que le partage de nos repas, nos missions poubelles, nos belles discussions, nos grosses disputes, nos réconciliations, notre simplicité de notre mode de vie, nos rencontres toutes uniques les unes des autres et surtout tous les imprévus et les surprises qui nous ont appris à apprécier et accepter d’aller à l’inconnu…

Atteindre la Cap Nord n’a rien de phénoménale… Ce n’est qu’une excuse, un but sans vraiment de sens ! L’important est tout ce qui nous est arrivée pendant ces 10 mois…

Un péage était installé et coutait 140 couronnes (17 euros) pour les véhicules ! Par contre pour ceux qui venait en moyen non motorisé c’était gratuit !!

D’un pas calme et serein nous traversons le bâtiment et apercevons enfin le fameux piédestal symbolisant le Cap Nord. Nous le rejoignons et savourons ce moment unique… Sondre était déjà là et semblait avoir les yeux humide ; Du haut de la falaise un océan à perte de vue se dévoilait sous nos yeux ébahis. 71°10°21° !! Nous y étions arrivé ! Il nous aurait fallu 280 jours et 5461 kilomètres depuis mon petit village de Francheville…

Nous restons ainsi planté là, à observer l’horizon sans fin….

Le mauvais temps avait cessé mais le vent nous envoyait des rafales de plus de 100 km/h ; Du coup après un petit shooting photo, nous rentrons dans l’infrastructure destinée aux touristes.

A l’intérieur se trouvait une immense salle où plusieurs tables et chaises étaient installées, une boutique de souvenirs, un restaurant, un cinéma, une chapelle, bref même au bout du monde la loi du business était là !

Cela faisait tellement bizarre de se dire que nous y étions, après tous ces mois à le dire à chaque personne rencontré, à y rêver, à en parler… Nous restons quelques temps à l’intérieur à nous échanger des cadeaux personnelles, à discuter, à rigoler… Sondre avait l’intention de revenir en stop jusqu’à chez lui, situé vers le milieu de la Norvège et il nous informa qu’il devait y aller maintenant. Une dernière photo de lui, une dernière blague, un long regard et il partit sans se retourner… Bordel mais qu’est-ce que c’est dur ces adieux ! C’est beau mais c’est dur… Ce fut vraiment un sentiment étrange de se retrouver une fois de plus à deux… La voix de Sondre semblait encore résonner en écho mais il était déjà loin…

Nous faisons un gros casse-croute de pleins de bonnes chose achetées quelques jours avant.

Nous passons ensuite plusieurs appels émouvants à nos familles et amis ; Nous rencontrons aussi beaucoup d’autre voyageurs venant d’un peu partout… Un couple d’Italiens étant partit de leur pays deux mois auparavant, des allemands étant aussi venus en vélo, un Français qui avait fait toute la route en voiture… Bref vous l’auriez compris le Cap Nord est le point de chute de beaucoup d’aventuriers. Un spectacle vraiment amusant et un poil répugnant était les cars de touristes débarquant toutes les 30 minutes : Le phénomène se produisait à chaque fois, des centaines de personnes armées de leurs appareils photos et de leurs plus belles casquettes de touristes fonçait à vive allure afin d’être les premier au piédestal. A croire que cela en était devenu une course !! Une fois tous réunis dans moins de 10 mètres carré, ils essayaient tant bien que mal de se prendre en photo en prenant des poses toute aussi ridicules les unes des autres.

Le spectacle tournait à chaque fois à l’insensé et nous nous privons absolument pas de les prendre eux même en photo afin de garder le souvenir de ce qui est et restera la folie humaine !

A l’origine du projet, j’avais imaginé faire le tour de l’Europe à pied pendant plusieurs années, j’en ai alors parlé à François qui après un temps de réflexion, pris la décision de partir avec moi, celui-ci choisis alors le Cap Nord comme objectif.

Que va être la suite maintenant ? Pour ma part j’ai l’attention de marcher au sud en direction de la mer baltique sur environ 1000 kilomètres, puis je prendrais un avion afin de rentrer chez moi pendant l’hiver. Je compte ensuite repartir de là où je me serais arrêté afin de continuer mon voyage autour de l’Europe.

François quant à lui décida de se rendre en Finlande afin d’y trouver un travail et peut être y vivre.

Le seul petit hic à tout cela c’est que pour le prochain mois nous allions emprunté pratiquement le même itinéraire… Nous décidons donc de partir en décalé c’est-à-dire que François partira demain matin et moi après-demain. C’était un peu bizarre mais nous n’avions pas trop le choix ^^

Les rafales de vent étaient affolantes et nous réussissons tant bien que mal à planter les tentes entre 3 murets. Nous étions obligé de mettre des grosses pierres sur chaque sardine afin d’empêcher à ce que la tente soit arraché du sol. La nuit fut infernale et au matin nous fonçons nous réfugier dans le bâtiment qui venait d’ouvrir.

Les derniers instants arrivèrent, ceux que l’on ne peut retarder…Symboliquement nous nous rendons à la falaise. Dans ce genre de moment c’est dingue comme on aimerais dire des centaines de choses importantes et qu’en fin de compte toutes ces choses se disent en un simple regard en silence…. Une dernière accolade et François partit. Cet instant était magique, intense, unique… Les larmes aux yeux je le vis s’éloigner au fur et à mesure. Je me remémorais tous ces longs mois à marcher ensemble, à avoir à chaque minute sa présence autour de moi, à affronter les moments difficiles ensemble, à prendre les décisions à deux… Tout cela était finis et je me retrouvais à présent seul avec moi-même.

Perdu dans mes pensées, le regard évasif sur l’océan, j’y repense et j’y souris.

Ce long chapitre se finit maintenant… Mais le livre n’en est qu’à son début et cela ne fait que commencer !

Roulé pigeons !

 

Jérôme

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Le Finnmark…

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Le retour des belles maisons Scandinaves

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Les premiers panneaux annonçant le Cap Nord !

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Nous suivons la E6 à travers de fabuleux endroits

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The pigeons’s team

La route du Cap Nord !!

La route du Cap Nord !!

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Les rennes semblent avoir tous les droits !

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Les alentours sont incroyables

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Et oui, record battu ! 52 kilomètres dans la journée

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L’entrée du fameux tunnel passant par dessous l’océan

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Deux heures très très longues…..

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L’île du Cap nord où aucune végétation ne peut pousser

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Encore des rennes !!

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Et c’est partis pour la dernière ligne droite !

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Des paysages féeriques…

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Le dernier kilomètre !

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Et l’arrivée émouvante !

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Une petite photo et Sondre nous quitta…

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Et le départ de François le lendemain…

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